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Comme un profond abattement.

Aujourd’hui c’est lundi, le calendrier à ma droite est formel et il n’en démordra de la journée.

Aujourd’hui c’est lundi, c’est le début de la semaine et mécaniquement la fin du week-end. J’ai du rester au lit un peu trop longtemps dimanche matin mais je n’ai rien vu passer. C’est toujours pareil, ces deux jours passent si vite que le dimanche soir on arriverait presque à douter de leur existence.

Aujourd’hui c’est lundi et c’est comme si une chape de plomb m’était tombée sur les épaules. Je suis tellement courbé sous ce fardeau que mon front en viendrais presque à balayer le sol à chacun de mes pas. Mes paupières sont lourdes comme deux ânes morts, mes gestes sont gourds et lents, c’est à peine si mes doigts ont la force suffisante pour enfoncer les touches du clavier.
Le travail continue à s’accumuler comme les piles d’assiettes sur le poste de plonge. Je regarde d’un œil a demi ouvert seulement sur les dossiers urgents qui s’empilent et grandissent en silence. Il ne manque que peu de chose pour que ses colonnades éclipsent bientôt mon soleil ou qu’elles s’écroulent et m’ensevelissent au passage.
Ci-git le kiwi bourré, mort un lundi des suites d’un éboulement de dossiers en retard dans la droite ligne d’un personnage de Franquin.

La semaine vient à peine de commencer et c’est comme si j’avais épuisé toute mes forces et mon potentiel pour les cinq jours à venir. Je me demande non pas de savoir si je vais réussir à m’extirper du lit demain matin mais plus présentement à ne pas m’endormir au volant sur le chemin du retour. Je vais sans doute avoir besoin d’un trans-palette pour me sortir du paddock.

Comment peut-on raisonnablement en arriver à ce niveau de démotivation ?
La réponse tient plus dans une accumulation de causes diverses que dans une seule et même raison factuelle. Je pense que je vais revenir plus longuement sur un facteur déterminant de la gestion d’équipe et in extenso de la bonne tenue d’une entreprise la motivation des troupes.

Dès que le courage me revient je m’y attelle, promis. En attentant puisse le ciel vous tenir en joie.

Du courage …

« Tout ira mieux à la minute où chacun d’entre nous se remettra à rêver grand, à faire des projets et à croire au fabuleux destin de cette entreprise. Ce que j’attends de vous c’est que vous remontiez vos manches et que vous vous donniez au maximum pour nous faire aller de l’avant … »

Ce court morceau d’un discours du meilleur cru de notre chef n’a sans doute pas eu l’effet escompté sur moi, ni peut-être même sur d’autres collègues que je ne nomérais pas si séant. Le pied du très haut viendrait-il me botter le fondement que je ne suis même pas sur que cela me motiverais d’avantage pour m’atteller à la tâche. Je m’applique avec le même entousiasme que le buffle qui tire sa charrue dans les rizières, bien que je n’en ai ni la force ni la persévérance.

Motiver ses troupes c’est un art, tout comme la peinture, les crêpes ou la manipulation de masse. Ce n’est pas donné à tout le monde et le travail, si acharné soit il ne suffit jamais à combler le manque de talent originel.

Mon chef n’est pas doué pour motiver ses troupes. Il n’y ai peut-être pas pour grand chose, je suis à moitié convaincu qu’il fait de son mieux pour insuffler une flamme qui l’a quitté depuis longtemps à sa piétaille. Il me donne parfois l’impression de me trouver devant un colonel de tranché qui hésite à l’heure de donner l’assault.

Si tout les chefs de guerre avaient été forgé de sa trempe, les soldats ne seraient jamais sorti de leurs casernes pour aller se faire joyeusement massacrer entre poilus. Nous aurions un pont de moins au mois de mai et une raison de moins d’en vouloir aux allemands. Il restera plus les matchs de foot pour permettre à des écervellés de se taper sur le crane. C’est pas moi qui me plaindrait de cette perte.

« … alors au travail. »

Tiens c’est déjà fini, je crois que j’ai du décrocher avant la fin. Je suis le mouvement général qui consiste à regagner lentement le havre de paix relatif de son bureau en attendant que la journée, puis la semaine se termine.

Que le ciel vous tienne en joie.

Démotivation et contagion.

D’un point de vue purement scientifique la démotivation n’est pas un virus, ni un microbe ou un prion. La démotivation est comme son nom l’indique une perte temporaire ou permanent de la composante ou du processus qui règle son engagement pour une activité précise.

Rien n’est plus insondable que le système de motivation derrière nos actions, ce n’est pas moi qui le dit mais Lichtenberg et je ne me permettrais pas de le contredire. Il arrive parfois que le complexe méchanisme qui pousse un individu à agir se grippe et s’arrête complétement. La méchanique humaine est faillible par nature, je ne vous apprend rien.

Si le rire est contagieux (et il ne s’agit pas non plus d’une maladie) la démotivation pourrait aussi l’être et à mon humble opinion : elle l’est. La gravité étant une constante universelle, tout tend naturellement vers le bas, c’est pour cette bonne raison que la démotivation est communicative et pas la motivation. Relisez Newton si le coeur vous en dit et profitez en pour balancer Aristote à la poubelle.

A ceux qui penseraient que mon métier et par extension celui de mon colègue est passionnant je ne saurais trop qu’applaudir leur ignorance crasse. Par essence le métier de développeur pourrait-être passionnant, mais nous sommes dans le domaine de la théorie. La théorie supporte très mal le passage de la réalité.
Dans le grand idéal je serais censé jongler avec des abstractions de l’esprit et produire l’essence même de la logique en code machine. Ca sonne bien, ça sonne grand et beau mais c’est à des centaines de lieues de la vérité. En fait j’ai parfois la triste impression d’être un mineur chilien qui descends au fond du trou pour y passer sa journée de labeur à pousser des wagonets de charbon. Dit comme ça, je ne risque pas de déclencher un afflux de vocation pour ce corps de métier.

Ce n’est pas propre à mon métier, combien de cuisiniers triment chaque jour dans les cantines pour sortir des assietés d’épinard oeuf dur à destination des cantines scolaires pour un seul Paul Beaucuse. Vous oseriez dire qu’ils font un métier passionnant et qu’ils défendent bravement la gastronomie française si réputée de part le monde. Essayez pour voir et pensez à filmer l’exploit pour la postérité.

Mon colègue est contagieux, moi qui suis pourtant habitué à broyer du noir de manière industrielle je n’ai pourtant pas besoin que l’on me rappelle les évidences de ma dure condition de pisseur de code. Ca aussi c’est glorieux, je vous laisse imaginez ce à quoi pourrait ressembler ma carte de visite et pourquoi je n’en ai pas.
Seulement voilà mon collègue se laisse aller au spleen et il ne rêve plus qu’à un changement de vie. Je suppose qu’il s’imagine déjà à la tête d’un chalutier, écumant les mers. Il aurait sans doute le bon profil, même si personnellement j’aurais plutôt opté pour un baleinier chassant le canot pneumatique Greenpeace au harpon explosif.

Désolé je me laisse moi aussi prendre à l’appel des sirènes du large, mon prochain post se fera peut-être de la cabine d’un matelot.

Que le ciel vous tienne en joie.